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« Jusqu'à ce qu'il n'y ait plus un seul Indien au Canada »

Pendant les 150 années du système de pensionnats autochtones, le Canada a connu 150 écoles et 150 000 élèves.
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  • Genocide

Duncan Campbell Scott allait diriger le système de pensionnats à son apogée, soit pendant la période de 1913 à 1932. Scott était ce que l'on peut appeler un assimilationniste extrême. En tant que fonctionnaire de carrière, il a été impliqué dans les Affaires indiennes pendant toute sa carrière (il a proposé de nombreuses modifications à la Loi sur les Indiens et a négocié l'un des principaux traités). Plus important encore, il a supervisé le fonctionnement des pensionnats. Scott était un fonctionnaire actif, et bien qu'il semblât apprécier certains éléments des cultures autochtones, il a aussi beaucoup contribué à leur destruction. 1  Qui plus est, en 1924, il a proposé une modification à la Loi sur les Indiens qui interdisait aux Autochtones sous son autorité d'embaucher un avocat (sans l'approbation du ministère des Affaires indiennes) pour les représenter dans le cadre de leurs revendications en matière de terres et de droits. 2  Pour cela et de nombreux autres gestes, Scott est appelé par les experts « l'architecte des politiques indiennes » pendant les premières décennies du 20ème siècle. 3

En 1920, Scott a également poussé et adopté une modification à la Loi sur les Indiens qui rendait la fréquentation de l'école obligatoire pour tous les enfants des Premières Nations âgés de 15 ans et moins. En raison de la modification, l'inscription des Autochtones est passée à environ 17 000 dans toutes les écoles et à plus de 8 000 dans les pensionnats à la fin de son mandat. Selon les rapports de Scott, à ce moment, 75 % des enfants des Premières Nations étaient inscrits dans une école, un taux qu'il a attribué à une volonté croissante chez ces enfants de suivre une éducation occidentale. Clairement, le fait que l'éducation était maintenant obligatoire, et que depuis 1930, elle incluait tous les enfants de 7 à 16 ans, avait quelque chose à voir avec ces chiffres. 4

Malgré le fait qu'il estimait que l'éducation à elle seule n'était pas suffisante pour civiliser les Peuples Autochtones au Canada, il militait fortement en sa faveur. Lorsqu'il a ordonné la fréquentation obligatoire de l'école en 1920, il a déclaré : « Je veux me débarrasser du problème indien. En fait, je ne crois pas que ce pays se doit de continuer à protéger une classe de gens qui sont incapables d'être autonomes... Notre but est de continuer jusqu'à ce qu'il n'y ait plus un seul Indien au Canada qui ne soit assimilé à notre société, qu'il n'y ait plus de question indienne, ni de ministère des Indiens. » 5  En raison de ses positions radicales, il est facile de comprendre pourquoi il est souvent associé à la citation « Tuer l'Indien pour sauver l'homme ». 6  Dans la discussion à savoir si les politiques d'assimilation canadiennes et les pensionnats constituent un  génocide , cette approche est souvent un élément de preuve déterminant. Scott résume l'attitude qui prévalait chez les représentants canadiens : les Autochtones, malgré les nombreuses ententes avec la Couronne qui garantissaient leur indépendance, devaient être éradiqués en tant que nations et cultures distinctes.

Au tournant du 20ème siècle, il y avait 18 écoles industrielles et 36 pensionnats; trois décennies plus tard, à l'apogée du système, il y avait 77 pensionnats financés par l'État au Canada. 7  Peu après, il y avait 80 écoles, dont « plus de la moitié (44) relevaient des différents ordres catholiques, 21 relevaient de l'Église d'Angleterre (plus tard l'Église anglicane du Canada), 13 relevaient de l'Église Unie et 2 relevaient des presbytériens ». 8  Pendant les 150 années du  système de pensionnats autochtones  , le Canada a connu 150 écoles et 150 000 élèves.

Malgré le fait que Scott était fier de son travail et du nombre croissant d'élèves dans les pensionnats, les choses ne se passaient pas bien. Le nombre d'écoles, écrit Brian Titley « ne s'est pas automatiquement traduit en nombre d'Indiens assimilés. Sans aucun doute, l'expérience des pensionnats a profondément touché les perspectives d'avenir des jeunes Indiens... La vaste majorité est restée distinctement indienne et les Indiens ont été peu nombreux à intégrer le marché du travail, si certains l'ont seulement fait. En ce qui concerne ses objectifs, la politique d'éducation des enfants indiens dans des écoles de jour et des pensionnats séparés a effectivement échoué ». 9

Au-delà de l'échec des pensionnats par rapport à leur objectif d'assimilation, Scott a été blâmé pour la négligence et les décès de nombreux enfants. Le Dr Bryce, comme nous l'avons vu, a relevé que les économies de bout de chandelle de Scott constituaient le principal obstacle à la promotion de réformes de base qui auraient pu sauver de nombreuses vies. Mais personne ne l'a écouté. C'est un Dr Bryce défait et vieillissant qui a publié un pamphlet en 1922 intitulé « L'histoire d'un crime national ». Dans ce document, il affirme que « Scott, en particulier, a constamment échoué à reconnaître et à aborder les besoins sanitaires des Autochtones. » 10  On estime aujourd'hui qu'au moins 6 000 élèves sont morts dans les pensionnats. La plupart des parents n'ont jamais su que leur enfant était mort. 11  Le bilan si élevé d'élèves morts de la tuberculose et d'autres maladies dans les pensionnats a récemment entraîné un débat houleux au sujet de la responsabilité du Canada pour ces décès.

  • 1À titre d'exemple, il a été responsable de « l'interdiction des danses autochtones et des cérémonies spirituelles et culturelles dans lesquelles de telles danses avaient lieu, comme le Potlach et la danse du soleil ». Nancy Chater, Technologies of Remembrance: Literary Criticism and Duncan Campbell Scott’s « Indian Poems » (thèse de maîtrise, Université de Toronto, 1999), 25–26, consultée le 12 septembre 2014.
  • 2Nancy Chater, Technologies of Remembrance: Literary Criticism and Duncan Campbell Scott’s « Indian Poems » (thèse de maîtrise, Université de Toronto, 1999), 26, consultée le 12 septembre 2014.
  • 3Brian Titley, A Narrow Vision: Duncan Campbell Scott and the Administration of Indian Affairs in Canada (Vancouver: University of British Columbia Press, 1986), 22.
  • 4Brian Titley, A Narrow Vision: Duncan Campbell Scott and the Administration of Indian Affairs in Canada (Vancouver: University of British Columbia Press, 1986) 91–92.
  • 5Archives nationales du Canada, groupe d'archives 10, vol. 6810, dossier 470-2-3, vol. 7, 55 (L-3) et 63 (N-3).
  • 6Cette citation est attribuée à Scott de façon erronée, bien qu'il eût sûrement été d'accord avec cette idée. Elle est du capitaine américain Richard H. Pratt. Voir Mark Abley, « The man wrongly attributed with uttering ‘kill the Indian in the child’ », Maclean’s, consulté le 12 Septembre 2014. Voir également « ‘Kill the Indian, and Save the Man’: Capt. Richard H. Pratt on the Education of Native Americans », site Web History Matters, consulté le 12 septembre 2014.
  • génocidegénocide : En 1944, Raphael Lemkin a créé le terme génocide pour décrire la destruction intentionnelle et systématique d'un groupe racial, politique ou culturel. L'étymologie du terme génocide vient du mot grec genos, qui signifie « race » et du mot cide, qui signifie « détruire ». Il a été défini juridiquement dans la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide de 1948 (la Convention sur le génocide). Lorsque le gouvernement canadien a ratifié la Convention sur le génocide de façon sélective en 1952, des éléments essentiels de la Convention en étaient exclus. De nombreux leaders, activistes et politiciens autochtones ont demandé publiquement au gouvernement canadien de reconnaître le système de pensionnats indiens comme un génocide.
  • 7James R. Miller, Shingwauk’s Vision, 116; Commission de vérité et réconciliation du Canada, Ils sont venus pour les enfants, 6.
  • 8George Erasmus, « Notes on a History of the Indian Residential School System in Canada » présentation à la Conférence « The Tragic Legacy of Residential Schools: Is Reconciliation Possible? » organisée par l'Assemblée des Premières Nations et l'Université de Calgary, 12 et 13 mars 2004.
  • système de pensionnats autochtonessystème de pensionnats autochtones Au début de 1883, le gouvernement fédéral cherchait un système pour enrôler les enfants autochtones dans les écoles. Le système de pensionnats faisait partie d'un programme plus vaste du gouvernement visant à assimiler les Peuples Autochtones à la société colonisatrice par le biais de l'éducation. S'appuyant presque exclusivement sur les églises pour fournir des enseignants, des administrateurs et des instructeurs religieux, le système a été gravement sous-financé et marqué par des normes inférieures d'éducation et de réussite : négligence, malnutrition, abus et maladies étaient monnaie courante. Au cours des dernières années, des chercheurs ont découvert que certaines écoles menaient également des expériences médicales dangereuses. On estime que plus de 6 000 élèves sont morts en raison de la maladie ou des abus pendant qu'ils fréquentaient de force ces établissements. Sur une période de 150 ans, le gouvernement et les églises ont dirigé près de 150 écoles où environ 150 000 jeunes autochtones ont été inscrits de force.
  • 9Brian Titley, A Narrow Vision: Duncan Campbell Scott and the Administration of Indian Affairs in Canada, 93.
  • 10Megan Sproule-Jones, « Crusading for the Forgotten: Dr. Peter Bryce, Public Health, and Prairie Native Residential Schools », Bulletin canadien d'histoire de la médecine 13 (1996), 218–19
  • 11John Paul Tasker, « Residential schools findings point to ‘cultural genocide,’ commission chair », CBCNews, 29 mai 2015, consulté le 16 juin 2015. Voir également Brenda Elias, « The challenge of counting the missing when the missing were not counted », article présenté lors de l'International Association of Genocide Scholars conference, « Time, Movement, and Space: Genocide Studies and Indigenous Peoples » 16 au 19 juillet, 2014, Université de Winnipeg.

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— Gabriela Calderon-Espinal, Bay Shore, NY